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ataraxosphere
26 juin 2009

Le MoDem peut-il avoir une crédibilité en matière de développement durable et d'environnement ?

   La question mérite d'être posée, dans la mesure où même certains de ses plus brillants membres font encore des confusions entre différentes notions voire ne semblent pas avoir pris la mesure de certains enjeux. Car il ne suffit pas de brandir l'icône Corinne Lepage ou de rappeler que CAP21 est membre fondateur du MoDem pour acquérir une crédibilité : il faut que les idées dont ils sont porteurs depuis des années intègrent réellement le projet et les pratiques démocrates, et que chaque adhérent s'en saisisse, y compris les responsables ; or la situation est encore loin d'être satisfaisante de ce point de vue, j'ai hélas eu de nombreuses occasions de le constater depuis deux ans. Le minimum pour tout un chacun, serait déjà de lire son petit essai "Vivre autrement" paru chez Grasset (j'en ai plusieurs exemplaires que je peux prêter).

   J'ai déjà expliqué sur ce blog que l'évolution soutenable prônée par Corinne Lepage (expression choisie en remplacement de développement durable à cause du greenwashing et de la querelle infondée avec la décroissance) est une approche basée sur la responsabilité qui concerne TOUS les domaines de la politique, même là où on ne l'y attendait pas forcément (y compris la diplomatie!). Elle ne se réduit absolument pas à la question environnementale (improprement désignée par le terme d'écologie, qui est une discipline scientifique).

   Arrêtons-nous un instant là-dessus. Même si c'était le cas, on constaterait que "l'écologie" est loin d'être aussi neutre qu'on l'entend souvent, en tant que sujet soi-disant non clivant. Certes, tout le monde peut se dire d'accord pour protéger la planète (encore que...), mais dès qu'il faut passer aux actes ou qu'on regarde de plus près les programmes, on constate que bien peu sont en adéquation avec cet affichage, qu'il s'agisse d'actions à entreprendre ou de pratiques à cesser. On peut remarquer au passage que, comme la question européenne, cela dépasse les frontières politiques classiques : il y a des "opposants" tant à gauche qu'à droite, qui se retrouvent réunis sur une même position pour des raisons très différentes... De fait, si certains insistent sur l'aspect "vert" de leur engagement, c'est donc bien parce que c'est un élément qui les démarque et a du sens (on peut discuter de la pertinence de leurs propositions en la matière, mais c'est un autre sujet ; et cela ne signifie pas par ailleurs qu'ils n'aient que cet angle d'attaque pour construire leur projet politique).

   Refermons la parenthèse. En effet, les choses ne se réduisent pas aux préoccupations purement environnementales, qui ne constituent que l'un des trois piliers de la démarche (avec le social et l'économique). L'intérêt et la grande force de l'évolution soutenable, c'est justement d'avoir une approche systémique, globale, tant dans l'espace (intégration des trois types de problématiques) que dans le temps (réflexion sur l'amont et l'aval et notamment les impacts, notion de cycle de vie, etc). Il s'agit d'un véritable projet de société, complet et diversifié. A ce titre, "l'écologie" n'est pas un simple filtre qui viendrait évaluer les propositions en fin de processus : il s'agit d'un élément structurant, à part entière.

   Un des principes clefs de l'évolution soutenable, c'est le principe d'action par priorité à la source : il faut concevoir correctement les choses dès l'origine et agir le moins possible en réaction. Par exemple, le meilleur déchet, c'est celui qu'on ne produit pas (avant même de songer au recyclage). C'est particulièrement évident en matière d'urbanisme et d'aménagement du territoire : l'habitat, les transports, l'activité en général, doivent être organisés en adéquation avec les différents enjeux.

   On peut commencer par bâtir un projet socio-économique dans l'absolu, pour le passer au "crible vert" à la fin, mais il y a de grandes chances qu'il ne passe pas l'épreuve et il y aura eu beaucoup de travail pour rien. Ce ne sont pas de corrections à la marge et a posteriori dont il y a besoin, mais bien d'une démarche complète et intégrée. D'ailleurs il y a de nombreux exemples qui montrent l'intrication des trois piliers, ainsi notamment des gisements considérables d'emploi qui découlent de la prise en compte des enjeux environnementaux (bâtiment, énergie, agriculture, etc).

   Mais j'irai encore plus loin. Des trois piliers, l'environnemental est en fait le plus structurant. En effet, les questions socio-économiques relèvent de la volonté humaine : les gens ont parfaitement le choix de construire une société équitable ou inégalitaire, libre ou totalitaire, organisée ou dérégulée, etc. Tandis qu'en matière d'environnement, les choses ne découlent pas des choix humains mais de la réalité physique du monde, dont on ne peut s'abstraire (même si ce fut la stupide tendance générale ces dernières décennies). C'est donc ce pilier qui conditionne tout le reste, et il va falloir se rentrer ça dans la tête une bonne fois pour toutes. Certaines ressources s'épuisent, d'autres sont altérées (polluées, appauvries, etc), avec des conséquences climatiques ou sanitaires qui concernent directement les populations humaines (je ne parle même pas des impacts indirects, ni du reste du monde vivant qui peuple la planète et qui n'avait rien demandé). Cela se traduit par un nombre considérable d'effets dans la sphère socio-économique qu'on ne peut donc pas négliger ou appréhender comme des questions secondaires.

   Je comptais continuer mais ce billet est déjà bien long. Alors pour terminer, comme je le disais dans un autre, il ne faut pas se laisser aveugler par le projecteur "vert" :

- d'une part, il n'y a pas de focalisation excessive sur le sujet, c'est juste un rattrapage après une longue absence par le passé, une illusion d'optique due à sa récente accession à la place qui lui est due (passer de epsilon à un tiers du discours, ça interpelle forcément),

- d'autre part, il n'y a pas que l'environnement mais bien les trois piliers indissociables, qui traduisent simplement la reconnaissance des trois facteurs de richesses pour la société : le capital financier, le capital humain et le capital naturel.

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Commentaires
F
le fait qu'il y aurait pourtant beaucoup à dire. J'ai vu la "première" vice-présidente une seule fois à Villepinte. La seule chose que je puis dire c'est qu'elle a bien voulu me serrer la main mais l'a fait sans me regarder et très rapidement (bien qu'énergiquement je dois l'avouer). D'où mon seul commentaire sur elle dans le premier article fait au retour de Villepinte ("Au congrés fondateur j'étais au fond de la salle.") "une poignée de main très pressée".<br /> Depuis, je n'ai plus jamais parlé d'elle je crois; en tout cas pas spécialement sur mon blog... Je préfère évidemment parler de Corinne !
F
Bah, je ne pense pas qu'il y ait besoin de "classer" les vice-présidences... et d'ailleurs je crois bien que ça n'existe pas dans les statuts. Mais c'est clair qu'il faudra régler le problème de celle qui se fait désigner "première", je l'ai vue samedi en réunion départementale et c'est une catastrophe elle n'a vraiment rien compris et si elle continue comme ça elle est fichue - et le MoDem avec, donc le pays et nous :-/ je n'en ferai pas un billet car je ne suis pas comme certain(e)s, et pourtant j'aurais un moyen d'exploser l'audimat du blog...
F
C'est effectivement parce que j'ai choisi de rejoindre et les idées de François Bayrou et celles de Corinne Lepage que j'ai fait ce double choix dès le début !<br /> Et, tout comme toi, je déplore grandement que certains "déçus" de droite comme de gauche, et surtout du Modem justement, rejoignent CAP21 sans en voir l'idéologie. S'ils n'ont pas de véritable préoccupation et humaniste et environnementale, ils se trompent de Parti.<br /> Ce que tu dis sur la position de Corinne me rassure. C'est sûr, humainement, elle semble appréciée à l'unanimité. Et elle le mérite bien. Pour ma part, je la verrais mieux comme première vice-présidente du MoDem tu t'en doutes...
F
@ Arnaud : Merci beaucoup d'avoir tout lu et pour le compliment. Je n'ai pas d'éléments sur l'importance des décroissants dans ces différents mouvements écologistes, mais d'après ce que je sais de leur fonctionnement, les choses ne s'analysent pas en termes de rapports de force ou de partisans/opposants à une proposition ou à un positionnement donc ce serait très difficile de répondre quand même...<br /> Quoi qu'il en soit je pense qu'il ne faut pas raisonner en termes d'étiquette, dans ce domaine comme dans d'autres et que bien souvent au-delà du vocabulaire il y a un accord sur le fond, au moins en partie... même si nous (et eux) n'en sommes pas toujours conscients au premier abord...<br /> <br /> @ Dominique : Je vous remercie et je suis parfaitement d'accord. J'ajoute que, bien qu'insistant sur la distinction entre DD et environnement, j'ai sciemment mis les deux dans le titre parce que sur les questions environnementales aussi il y a des lacunes importantes... et il faudra d'ailleurs qu'il y ait des débats internes sur certains sujets "sensibles", tant entre responsables qu'entre militants tout court. Ce ne sera pas de tout repos...<br /> <br /> @ JF : Merci et comme je viens de le dire en réponse à dominique, il faudra rapidement mener des débats internes sur ce sujet comme sur d'autres, j'aimerais qu'il y ait des conventions thématiques avec des experts comme il y en a eu avant les élections européennes, éventuellement aussi lors des universités de rentrée. Je ne crois pas que Corinne Lepage soit totalement anti-nucléaire dans l'absolu, ses récentes prises de position visaient le nouvel EPR et découlaient d'une argumentation d'abord économique de la situation (je peux vous envoyer les éléments si cela vous intéresse) que je trouve parfaitement fondée. Je mets par ailleurs en lien un de mes billets sous mon pseudo.<br /> <br /> @ Audrey : Merci à toi ! ;-)<br /> <br /> @ OV : On en reparle à ton retour ^^<br /> <br /> @ Thierry : Content que tu passes ici :) C'est vrai que sur ce sujet comme sur d'autres, les médias ne facilitent pas les choses, entre simplification outrancière et greenwashing hypocrite...<br /> <br /> @ Françoise : Merci pour cet éclairage, c'est vrai que la prévention et l'anticipation sont des points clefs de la démarche. Par ailleurs je suis arrivé au MoDem pour diverses raisons mais notamment avec une vision similaire à la tienne sur l'apport de CAP21. Sur le nucléaire, comme je le disais il faudra aborder le sujet en interne, de manière apaisée et objective, mais dans la transparence. C'était d'ailleurs un souhait de FB pendant la campagne de 2007 il me semble.<br /> <br /> @ Françoise bis : Je ne crois pas du tout que CL soit dans une posture de subordination !! Ni qu'elle soit reniée lorsqu'on adhère au MoDem tout court !! Le choix de l'autonomie relative de CAP21 avait des raisons bien particulières et parfaitement justifiées (et confirmées d'ailleurs au vu des deux ans qui viennent de s'écouler) et il est normal que les adhérents du MoDem n'en fassent pas partie ; leur adhésion doit se faire aux idées, qui doivent devenir celles du MoDem ou disons y être intégrées : inutile donc de passer par la case CAP21, surtout en l'absence de compétence ou d'intérêt réel pour les sujets traités. Je suis un peu inquiet par le récent afflux massif de militants déçus du MoDem qui semblent avoir fait ce choix d'abord pour des raisons de forme (démocratie interne par exemple) et pas tellement pour les idées de fond (que savent-ils en détail à part qu'il s'agit d'une formation écologiste?). On peut d'ailleurs faire le parallèle avec les déçus du PS qui ont rejoint FB sans vraiment l'écouter (ni le lire, pourtant son article de la revue Commentaires est court et téléchargeable gratuitement) car on constate qu'ils n'ont pas réalisé leur aggiornamento idéologique et prônent toujours les mêmes inepties de gauche, ce qui est de très mauvais augure pour la suite (je précise que je ne viens pas de la droite, et que je considère que la gauche ne porte pas que des inepties dans le débat politique, loin de là). Je ne prône absolument pas le repli sur soi, mais à un moment si on veut être efficace et cohérent il y a des décisions à prendre... ou pas.
F
aux pigeons voyageurs alors Martine ! Je leur souhaite d'arriver à bon port, car j'ai cru comprendre que leur mission secrète est de grande importance, n'est-ce pas ?!<br /> Je vais essayer pour ma part de faire un long vol plané, pour voir d'un peu plus loin pendant quelque temps. Pourvu que je ne plonge pas trop profond après ça... ;-)<br /> <br /> Sinon, Florent, je suis revenue sur les différents commentaires concernant CAP21. La grosse difficulté pour Corinne Lepage est qu'elle est restée indépendante certes mais dans une posture de subordination, de sous-groupe dans lequel on n'est pas obligé de rentrer : Cela signifie que l'on peut même + ou - la renier si on choisit de cotiser MoDem. Alors que l'inverse n'est pas vrai puisque si on cotise CAP21, on n'est pas forcément obligé de cotiser MoDem : on y est "de droit". C'est là que le bât blesse !<br /> Il faudrait qu'elle revoit cette position avant les présidentielles il me semble. Je n'ai pas encore pu lire tout ce qui s'est dit au dernier congrès et n'ai malheureusement pas eu les moyens d'y aller. Peux-tu me donner ton avis ?
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