Les pauvres n'intéressent pas le MoDem.
C'est
évidemment faux, et je vais en donner quelques éléments d'explication.
Nos concitoyens peuvent toutefois se poser la question, au vu d'un certain
nombre de faits désagréables, voire révoltants.
Passons
sur les (nombreux) points en internes, qui sont hors sujet le temps de ces
élections municipales.
Le
nouveau tract que l'on me demande de défendre pour cette campagne parisienne,
parmi ses nombreux défauts sur lesquels je ne m'attarderai pas, comporte sous
son titre "Pour une ville plus humaine" la mention "Notre
projet pour les classes moyennes à Paris". En plus d'être un
contre-sens (comment peut-on oser se prétendre humain en ne se préoccupant pas
des plus démunis ?), cet en-tête est presque insultant pour nos concitoyens les
plus modestes : on leur envoie en pleine face un "votre sort nous
indiffère" cinglant – alors que nombreux parmi eux ont cru et croient
encore au message d'espoir de François Bayrou et des dizaines de milliers de
citoyens qui l'ont rejoint dans cette grande aventure qu'est le Mouvement
Démocrate (une autre façon de faire de la politique, saine, dépassant les
absurdes clivages idéologiques et soucieuse de l'intérêt général, ne laisser
personne sur le bord du chemin). Cette bourde est non seulement suicidaire du
point de vue électoral, mais aussi scandaleuse du point de vue moral et j'exhorte
l'équipe qui conçoit ces tracts à ne pas reproduire pareille maladresse.
Bon,
c'est vrai, la volonté affichée de s'adresser aux classes moyennes n'est pas
totalement injustifiée. Ces catégories sont globalement les moins considérées
dans le discours politique, alors même que ce sont elles qui contribuent le
plus à l'effort national et au fonctionnement de la société. La droite ne leur
propose guère que des baisses d'impôts (souvent trompeuses d'ailleurs), son
attention se focalisant sur les plus aisés (réduction considérable de leur
contribution à l'effort national, dépénalisation des délits financiers, etc) et
son discours populiste s'adressant aux plus défavorisés (stigmatisation de
boucs-émissaires, encouragement au repli sur soi en flattant les instincts
égoïstes et communautaires, relents xénophobes, etc – il faut bien faire du
nombre...). La gauche aussi concentre son message sur les plus démunis (même si
son discours est souvent en décalage avec ses actes lorsqu'elle est au
pouvoir...) et ne voit dans les classes moyennes qu'une vache à lait pour les
différentes taxes qui constituent son principal (sinon unique) instrument
politique (attention je suis un fervent partisan de l'impôt comme contribution
individuelle à la collectivité et expression de la solidarité nationale, mais
sous d'autres formes que celles qui existent actuellement ; mais ce n'est pas
le sujet ici).
Le
Mouvement Démocrate propose donc une autre approche, intelligente et
responsable, avec notamment de vraies propositions pour les classes moyennes.
Par exemple sur le logement : à Paris, entre le parc social (moins de 9€/m2) et
le parc locatif privé (plus de 22€/m2), il y a un gouffre que de nombreux
foyers ne peuvent franchir (alors même qu'ils auraient les moyens de vivre en
dehors du parc social). Résultat : soit ces ménages restent dans leurs
logements sociaux dans de mauvaises conditions (surface insuffisante par
exemple), soit ils sont contraints de s'exiler dans les communes avoisinantes,
de plus en plus loin en périphérie (puisque les loyers augmentent
considérablement et de plus en plus rapidement). Le Mouvement Démocrate a donc
inscrit dans ses objectifs prioritaires le développement du logement
intermédiaire (loyers à mi-chemin entre le parc social et le parc privé
"classique", restant abordables pour la plupart des familles) ;
n'étant pas spécialiste de ces questions, je vous renvoie au programme pour les mesures
techniques permettant d'atteindre cet objectif.
Ce
discours ne doit cependant pas masquer le souci des plus faibles : l'approche
du Mouvement Démocrate, c'est aussi apporter des réponses à chacun (et surtout
AVEC chacun). Aucun de nos concitoyens ne doit être exclu du discours et tous
doivent "y trouver leur compte". Donc, contrairement à ce que
pourrait laisser penser ce titre de tract, le MoDem a aussi des choses à
proposer aux plus modestes. Il faut ici insister sur un point important de la
démarche du Mouvement Démocrate : elle vise la responsabilisation et l'accès à
l'autonomie pour les citoyens en général, et pour les plus défavorisés en
particulier. Ceci nous distingue clairement de la gauche : si nous nous
rejoignons sur les objectifs d'humanisme et de solidarité (face à une droite
égoïste décomplexée, qu'elle soit conservatrice ou "libérale"), nous
divergeons sur les réponses à apporter et les moyens à mettre en oeuvre pour
les atteindre. Ainsi, alors que la gauche installe et enferme les plus
défavorisés dans l'assistanat sans perspective d'issue (cela tourne parfois au
cauchemar, cf. le système clientéliste des communistes décrit récemment
dans Marianne), sans parler de la déresponsabilisation qu'induisent les
"aides" et les exonérations de toutes sortes, le Mouvement Démocrate
a lui pour objectif de donner à chacun les moyens de s'en sortir puis de progresser,
à la juste mesure de ses efforts, quel que soit son point de départ. Je n'ai
pas encore eu le temps de lire le programme en détail et je vous y
renvoie donc pour les mesures à destination des plus modestes.
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pour certaines personnes, un billet de 20€ ça n'existe même pas tellement c'est
insignifiant ;
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pour certaines personnes, il n'a pas plus d'existence qu'une pièce rouge
coincée au fin fond d'une poche ;
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pour d'autres, il s'agit bien d'argent, mais guère important, il n'y a pas lieu
de s'en préoccuper ;
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pour d'autres, une telle somme mérite considération mais n'est pas un souci ;
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pour d'autres, cette dépense est effectuée sans problème mais s'inscrit dans le
budget ;
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pour d'autres, cette dépense peut être effectuée moyennant quelques ajustements
ou choix sur d'autres postes de dépenses ;
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pour d'autres, cette dépense constitue un poste non négligeable mais restant
"dans les clous" ;
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pour d'autres, cette dépense n'est envisageable que par prélèvement dans les petites
économies ;
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pour d'autres, cette dépense reste envisageable en cas de coup dur en prélevant
dans la maigre réserve dédiée ;
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pour d'autres, cette dépense ne peut être réalisée que moyennant des sacrifices
sur d'autres postes vitaux (par exemple par diminution de la qualité et/ou de
la quantité des repas) ;
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pour d'autres enfin cette dépense n'est même pas possible.
Il
faut bien prendre conscience que les dernières catégories de cette liste à la
Prévert sont loin d'être anecdotiques (et particulièrement répandues chez les
jeunes adultes). Plus globalement, je rappelle que la moitié des gens gagnent
moins de 1500€ par mois et un quart moins de 1200€ par mois – et encore, ces
chiffres sont biaisés : si l'on ôte les impôts pour ne conserver que la somme
nette disponible au budget, il y a un écrasement du deuxième quartile et près
de la moitié des gens gagnent moins de 1300€ par mois... Sans parler des
difficultés pour se loger (exacerbées en région parisienne), beaucoup de gens
n'ont pas encore les moyens d'avoir un ordinateur et une connexion à internet,
il ne faudra pas l'oublier...