TVA "sociale"
Voici une petite compilation d'arguments en faveur ou en défaveur de la TVA dite "sociale". Ils proviennent essentiellement d'un article du Monde
du 08-06-07 (point de vue de deux économistes) et d'un très bon article du blog
d'Hervé Torchet. A vous de vous faire votre idée... et de réagir ;-)
Brièvement, ce dispositif prévoit d'augmenter la TVA (taxe sur la valeur
ajoutée) sur les produits de consommation et de baisser (de manière
équivalente) les prélèvements fiscaux sur les salaires que payent les employeurs.
Ces derniers prélèvements étant utilisés pour la protection sociale, cette TVA
est dite "sociale" (on fait aussi miroiter un soi-disant effet
protecteur contre les délocalisations).
Arguments pour
:
- Allègement des charges pesant sur les salaires
(elles pénalisent la production), ne pas faire financer (trop) la protection
sociale par le travail : amélioration de la compétitivité des entreprises ("efficacité
économique")
- Avancer vers un contrôle démocratique des budgets
(énormes) des comptes sociaux (gérés par les organismes sociaux non soumis au
contrôle démocratique), puisqu'une partie de ces moyens passent ainsi sous le
contrôle du ministère des finances ("exigence démocratique")
- Clarification comptable et financière : les
dépenses relevant de la solidarité (ou protection collective, devant être payée
par tous : allocations familiales, remboursement des soins) et non pas de
l'assurance sociale (ou protection individuelle, qui dépend logiquement des
revenus et peut être financée par le travail, donc des prélèvements sur les
salaires : retraites, indemnités maladie, prestations chômage) sont extraites
des comptes sociaux
- S'il y a équilibre entre les recettes
supplémentaires par cette hausse de TVA et les pertes de recettes par cette
baisse des prélèvements sur les entreprises, cela ne coûte rien à l'Etat
Arguments contre
:
- La TVA est l'impôt le plus injuste puisqu'il touche la population sans distinction de
revenu : il pèse plus lourd pour les ménages les plus pauvres que pour les ménages
les plus riches (pas de proportionnalité aux revenus), il accroît les
inégalités
- La hausse de la TVA pénalise la consommation (baisse du pouvoir
d'achat, inflation) et la croissance (basée en France surtout sur la
consommation, à la différence de l'Allemagne qui exporte beaucoup ; sans parler
de conséquences en cascade sur les mécanismes financiers, comme les taux
d'intérêt), à la fois au niveau des produis importés, mais également au niveau
des produits nationaux, car on sait très bien que les entreprises ne
répercuteront pas la baisse des charges sur leurs prix ni sur les salaires,
qu'il s'agisse de GE ou de PME (pour diverses raisons, ainsi que par expérience
depuis des années d'exonérations qui ne se sont traduites ni par une
augmentation du pouvoir d'achat ni par des créations d'emploi) ; certains
prétendent que le bilan est nul donc indolore sur les prix des produis
nationaux car il y aurait compensation entre l'augmentation de TVA et la baisse
des charges, mais ceci impliquerait qu'il y ait une baisse préalable des prix
(ou, pour maintenir le pouvoir d'achat, une augmentation des salaires), or on
sait pertinemment que ce ne serait pas le cas
- La protection sociale française est ainsi financée
en partie par le travail des étrangers à l'étranger, en particulier par des
pays pauvres qui n'ont même pas de protection sociale ; ce n'est pas acceptable
- L'amélioration de la compétitivité économique française est négligeable : face à des écarts aussi grands entre le coût du travail et des produits en France et dans les pays en développement, ces quelques % de variation de la TVA ne changent pas grand chose et ne constituent en aucun cas une arme
anti-délocalisation comme certains le prétendent ; et vis-à-vis de nos voisins
européens, si tout le monde fait pareil les conséquences seront nulles (simple
déplacement de l'équilibre) mais avec de graves conséquences sur le projet
européen (mauvaise perception puisque marasme économique généralisé)
- Cette hausse de TVA revient à augmenter le prix des
produits importés donc correspond à un rétablissement de droits de douane en
contradiction avec les accords de libre-échange signés par la France
- La tentation est grande d'utiliser les recettes
supplémentaires pour financer d'autres mesures (on sait que le nouveau
gouvernement a créé des dépenses et pertes de recettes considérables sans
financement et donc sans souci de l'accroissement de la dette...)
- Puissance accrue du ministère des finances
A mon avis, si ce dispositif part d'une bonne
intention (diminuer le coût du travail, améliorer la compétitivité des
entreprises, trouver d'autres financements à la protection sociale, contrôle
démocratique des comptes sociaux, etc), il
n'apparaît pas constituer une bonne solution (peu d'efficacité sur les
objectifs, et en plus génération de nombreuses conséquences néfastes). Certains
des problèmes soulevés par les partisans du dispositif doivent néanmoins trouver une solution, ce sera l'objet de prochains articles.