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ataraxosphere
14 novembre 2007

Chapitre 1 : Introduction et rappels de quelques faits

J'inaugure ici la série d'articles que je projette de publier sur la recherche et l'enseignement supérieur (indissociables si vous en doutiez encore), sujets qui me tiennent particulièrement à coeur, et pas seulement parce que je suis directement concerné (étant actuellement doctorant en sciences naturelles dans un laboratoire public). Je précise tout de suite que ces thèmes sont également indissociables d'autres domaines, notamment l'éducation (enseignement primaire et secondaire) et évidemment l'économie, qui seront donc parfois traités de concert.

 

C'est un travail sur la durée, donc je sollicite votre patience et votre indulgence (je ne suis pas certain de pouvoir respecter un rythme hebdomadaire comme nos valeureux historiens démocrates de GrozBulles). J'envisage cette série d'abord comme une suite de réflexions, de faits et de témoignages, dont le cours sera adaptable en fonction de vos contributions et souhaits de placer la priorité sur certains sujets (dans le temps voire dans l'absolu), peut-être aussi de l'actualité (même si en général je préfère réagir avec un certain recul). Il sera bien temps au bout de quelques mois, de les reprendre pour faire une synthèse et produire un contenu plus structuré et dirigé. J'espère notamment que ce fil rouge et ces échanges pourront avoir l'honneur de vivre grâce aux contributions de l'ineffable Benjamin, parce qu'il est brillant et aussi parce qu'il est en droit ce qui permettra de croiser les expériences et les modes de fonctionnement de ces deux mondes (que je soupçonne fort différents). Ce roman-fleuve me permettra en tous cas d'exposer ma vision de ce qu'est, devrait être et pourrait être la recherche scientifique de la France et en fait de tout pays qui se prétend développé. J'entends également faire mieux connaître et comprendre ce monde si particulier et si attachant qu'est celui de la recherche, loin des clichés qui circulent à son sujet, à commencer par sa prétendue austérité.


Outre mon expérience personnelle et des articles de presse ponctuels, mes principales sources d'information seront l'ANDèS (Association Nationale des Docteurs ès Sciences), le mouvement SLR (Sauvons la Recherche!), le MESR (Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche), et l'UNEF (Union Nationale des Etudiants de France). Je suis loin d'adhérer à la totalité des contenus présents dans ces sources (en particulier les deux dernières...) mais ils permettent au moins de connaître des points de vue et offrent une certaine vision de l'information, qu'il nous appartient de recouper et d'analyser. Si vous en avez d'autres à me suggérer n'hésitez pas. En aucun cas je ne prétends à l'exhaustivité et je vous invite à me signaler des textes importants qui m'auraient échappé.


Avant de plonger en détail dans la fameuse "loi sur les libertés et les responsabilités des universités" ("loi LRU"), je vais d'abord rappeler brièvement quelques faits (façon citoyen lambda ayant butiné dans les médias, sans pousser à fond pour l'instant) puis dans l'article suivant commencer l'étude de la lettre de mission que Henri Guaino Nicolas Sarkozy a envoyée à Valérie Pécresse, Ministre de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche. Les détails et les enjeux viendront ensuite (je ne traiterai d'ailleurs pas que cette loi, mais aussi tout le système de fonctionnement de la recherche, en particulier les dispositifs mis en place sous le gouvernement Raffarin il y a quelques années).


Cette réforme (dont le fait saillant retenu est d'accorder une plus grande autonomie aux universités, notamment par un plus grand pouvoir dévolu au président de l'université, je ne détaillerai pas pour cette fois), présentée comme la plus importante de la mandature (et ç'aurait dû être le cas), a été l'un des premiers textes adoptés par la majorité fraîchement (ré)élue au début de l'été 2007. Compte tenu de son importance (réelle et théorique), on peut s'interroger sur la précipitation et la quasi-absence de négociation dont ont fait preuve la Ministre et le Président pour présenter et faire adopter ce texte... Oh, bien sûr, on me rappellera que des mesures ont été adaptées voire retirées du texte initial suite à la pression des syndicats et autres acteurs ; mais ce n'est qu'un épiphénomène, une victoire en trompe-l'oeil car les enjeux de fond n'étaient pas là. On commence à avoir l'habitude, il s'est d'ailleurs passé quelque chose de semblable avec la loi sur l'immigration plus récemment. Le gouvernement (ou plutôt le Président...) use et abuse d'une tactique pourtant bien connue : présenter un texte où figurent quelques points inacceptables de nature à déchaîner les passions... et focaliser l'attention. Ainsi, les efforts se concentrent sur ces points et évidemment ils sont modifiés ou retirés, donnant l'impression d'une prise en compte des partenaires en présence, d'une volonté de consensus, d'un compromis raisonnable basé sur la négociation. Et pendant ce temps, tout le reste passe ! Or, si cette loi contient du bon, elle porte également en germe des éléments dangereux à moyen ou long terme (je n'en parlerai pas aujourd'hui).

En l'occurrence, pour la diversion, trois points étaient vivement critiqués :

(1) le fait que l'autonomie ne soit pas obligatoire pour toutes les universités, ce qui risquait d'accentuer les inégalités entre universités, de provoquer le développement d'un enseignement supérieur et d'une recherche à plusieurs vitesses, de défavoriser certains territoires et leurs habitants, etc

=> une clause d'obligation d'accès à l'autonomie pour 2012 (dans cinq ans) a été ajoutée

=> j'estime que cette généralisation était en effet justifiée et indispensable

(2) le fait que le conseil d'administration soit considérablement restreint en nombre de membres (une vingtaine contre plusieurs dizaines auparavant, ce qui générait il est vrai des blocages et des délais plus ou moins longs avant de trouver des consensus... mais n'est-ce pas aussi cela la démocratie ?) et modifié en composition (nombreux membres nommés par le président de l'université, dont des extérieurs), aboutissant notamment à réduire le poids des représentants syndicaux (professionnels et étudiants) et surtout à créer des problèmes de représentation des différents acteurs et domaines qui constituent l'université (par exemple, les diverses disciplines enseignées et pratiquées dans les laboratoires : mathématiques, chimie, biologie, etc)

=> le texte a été assoupli et le CA peut normalement atteindre une trentaine de membres

=> c'est sans doute un bon compromis, mais il faut voir dans le détail et au cas par cas, et notamment veiller à ce que la représentation des différents secteurs disciplinaires soit bien assurée

(3) la sélection à l'entrée du Master (pour mémoire, depuis quelques années les études à l'université s'organisent en trois blocs : License en 3 ans puis Master en 2 ans puis Doctorat en 3 ans, c'est le LMD avec des diplômes à Bac+3,5,8)

=> les cris d'orfraie des syndicats (l'Unef en tête évidemment...) ont conduit au retrait de cette proposition

=> en l'état actuel des choses je pense qu'en effet une telle sélection est inacceptable, cependant ce sujet devra impérativement revenir sur la table tôt ou tard, lorsque certaines conditions seront remplies...

 

Je terminerai ce premier article en disant simplement que la grande majorité des discussions et projets qui concernent la recherche et l'enseignement supérieur, en particulier universitaires (mais pas seulement), sont complètement à côté de la plaque et qu'il y a un vrai malentendu à leur sujet, porteur de très graves conséquences à long terme, et témoignant d'une profonde méconnaissance et d'une profonde incompréhension sur ce qu'ils sont, devraient être et pourraient être. Nous y reviendrons.

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Commentaires
F
@JM31 : commentaire très intéressant qui pour une bonne partie me conforte dans ma position, mais chut c'est anticipé ;-) nous en reparlerons... (Je suis quand même content de trouver des points d'accord, mouarf)<br /> Merci pour le lien, je le visiterai dès que possible. <br /> <br /> @Fred : fondamentalement je suis pour la sélection à l'entrée du master, mais pas n'importe comment et particulièrement pas dans les conditions actuelles , je pense que le taux d'échec en master est une donnée très secondaire dans cette affaire, tu comprendras pourquoi bientôt...
F
Pourquoi es-tu opposé à la sélection en Master ? J'ai l'impression qu'officieusement ça se faisait chez moi... moi je ne suis ni pour ni contre. Quel est le taux d'échec au master ? Moi j'ai l'impression que tout le monde y arrivait en lettres.
J
Hello<br /> <br /> Bon, beaucoup de choses à dire pour ce vaste sujet, dont j'ai écrit quelques trucs dans la rubrique "éducation".<br /> <br /> Je suis moi aussi opposé à la sélection avant l'université pour une seule et bonne raison: j'ai des étudiants qui se "révèlent" en cours d'année. Très moyens au lycée, ils murissent ou étudient qch qui leur plaise, ou encore aiment bien cette autonomie, bref ils deviennent bons.<br /> <br /> Par contre, cela ne doit pas nous faire oublier qu'il y a quand même une sélection masquée. En droit, il faudrait avant parler des stats, enlever les "étudiants fantômes", ceux inscrits uniquement pour les bourses. Je dirai quand même 10 % de mes effectifs.<br /> Après, il y a beaucoup d'abandon, pour cause, et c'est là le problème d'une lacune dans l'orientation. D'une classe de 30, on finit souvent à 20. Sur les 20, 8 redoublent... Et sur les 12 reçus, 6 l'ont eu à la repêche (je dis ça à la louche).<br /> <br /> Il faudrait quand même s'interroger sur la présence des bacs techno, qui échouent beaucoup chez nous. Mais là aussi,il y a toujours des exceptions notables: j'avais un pote à la fac qui sortait d'un BEP Compta puis Bac Pro, alors...<br /> <br /> Les basc techno sont fait pour aller en BTS. Or, ces instituts filtrent tellement, pour certains, qu'ils ne peuvent plus rien faire à part... la fac !<br /> <br /> Au fait, tu pourrais faire un tour sur ce site:<br /> http://reseaurementa.free.fr/modules/news/
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