NON aux primaires !!!
Une idée saugrenue circule
depuis quelques temps au MoDem : le choix des candidats aux élections par un
vote des militants ou, plus farfelu encore, par l'ensemble des sympathisants
non membres du parti. Bien que je n'en aie plus le souvenir, il se peut que
j'aie été un temps favorable à la première option ; heureusement, j'y ai depuis
réfléchi et j'y suis désormais fermement
opposé, pour diverses raisons que je vais tenter d'expliquer ici (et qui
recoupent un certain nombre de réflexions émises -plus concisement qu'ici!- par
le sage Joseph et l'étonnante Marie-José Votier que j'ai découverte avec
plaisir cet été sur Générations Engagées, "le site où on passe ses
soirées" lol).
Evacuons immédiatement la
seconde option, celle du choix élargi. On ne voit pas pourquoi des personnes
non membres du parti auraient leur mot à dire sur les candidats : si elles sont
si intéressées, qu'elles adhèrent, cela aura de plus l'avantage de leur
apporter plein d'autres choses bien plus intéressantes, à commencer par des
informations plus abondantes et fiables à propos des idées et du programme du
MoDem, qui ne sont quasiment pas relayés par les médias (et mal, quand c'est
le cas). Cette démarche volontaire est au coeur de la citoyenneté, car ce n'est
pas en quelques jours ou semaines avant des élections à travers quelques tracts
& flashes médiatiques que l'on se renseigne sur les idées d'un parti : un
travail de réflexion de fond est indispensable pour un vote éclairé, conditio sine qua non de la démocratie.
De la même manière que l'on ne peut que déplorer le faible taux de
syndicalisation dans ce pays, on ne peut que regretter le faible taux
d'encartement dans les partis politiques, encore dix fois moindre (!).
Mais revenons à nos
affaires. On pourrait également objecter que les citoyens devraient avoir leur
mot à dire sur les personnes qu'ils élisent et ne pas se les faire imposer par
une minorité de militants voire de quelques responsables de partis politiques.
C'est une remarque très juste, mais HORS SUJET ACTUELLEMENT. Ces problématiques
doivent être traitées dans le cadre d'une refonte globale de notre
"démocratie" (pour qu'elle en devienne une...) et notamment de ses
modes de scrutin (que je présenterai une autre fois). En clair : généraliser le
processus à l'ensemble des partis & élections, en s'affranchissant de
certains biais comme l'entrisme (il serait trop facile à des adversaires
politiques de participer aux primaires et de faire désigner le plus mauvais
candidat...) et de divers problèmes matériels ou logistiques dans
l'organisation du processus. Certains pays nous offrent une expérience
opérationnelle qu'il faudra creuser. Mais je n'en dirai pas plus cette fois-ci.
Abordons à présent la
première option, celle du choix exclusif des militants. La question de
l'entrisme est là encore suffisante pour la rejeter. Mais ce n'est pas le seul
problème. Outre les difficultés matérielles (déjà abordées sur GE)
qu'implique un processus réellement démocratique, cela poserait de graves
problèmes au sein du parti. Car la présence de personnalités candidates à la
candidature, non seulement génère une ambiance courtisane et/ou de fan-club
hautement délétères pour un parti (surtout quand il prétend faire de la
politique autrement et sainement), mais crée également de graves tensions, des
divisions et des blessures qui ont énormément de mal à cicatriser - et aucune
chance compte tenu des délais et du rythme électoral en vigueur dans notre
pays.
De manière générale, je ne
cesse de le clamer, il faut bien comprendre que la démocratie ce n'est pas la loi du nombre ! J'aurai l'occasion
d'y revenir. Et quoi qu'il en soit, certains enjeux ou un besoin de cohérence
peuvent dépasser le choix des militants (encore une fois cela ne signifie pas
qu'il faut tout imposer d'en haut sans un mot d'explication ni consultation
préalable).
Ceci m'amène à quelques
éléments supplémentaires de réserve au sujet des primaires internes : les
parachutages et les composantes du mouvement.
On critique beaucoup les
"parachutages" de candidats en des lieux géographiques où ils
n'avaient ni travail ni domicile et donc dont ils n'ont a priori pas à s'occuper. Je pense que dans certains cas, et en
dehors des élections ultra-locales où la connaissance du quotidien de la
population est importante (élections municipales des petites & moyennes
communes), ce refus ne se justifie pas et le "parachutage" n'est pas
forcément un drame. Je ne vais pas me lancer dans un plaidoyer mais il me faut
étayer un peu cette position. On peut imaginer des tas de situations où une
personne de valeur utile au pays peut être mise en avant hors de sa localité
d'origine. Par exemple lorsqu'il y en a plusieurs dans la même ville et qu'il
n'y a qu'une place éligible, ou lorsqu'il s'agit d'une circonscription
"imprenable", ou encore compte tenu des exigences de la parité et des
diversités par exemple (rappelons au passage que malgré la confusion qui règne
dans les têtes de bien des gens, les députés n'ont pas un mandat territorial
mais national, bref j'aborderai ça une autre fois). Ne détaillons pas plus car
ce billet est déjà suffisamment long, mais gardons à l'esprit que ce qui
importe, c'est d'abord les qualités de la personne et son utilité pour le pays
et la population à travers son mandat. Et qu'on ne vienne pas parler de
"légitimisme" pour des membres locaux qui s'estimeraient lésés : nous
ne sommes plus (censés être) dans un système féodal (ça ne tiendrait qu'à moi
je virerais illico presto les
"journalistes" qui emploient le terme de "fief") et puis ce
qui doit leur importer c'est la mise en oeuvre de leurs idées pour le pays et
non leur carrière personnelle (d'ailleurs il faudra aussi que je parle de la
nécessaire "déprofessionnalisation" de la politique). Je suis écoeuré
quand je lis des querelles entre des personnes qui partagent les mêmes idées
mais se déchirent et se détruisent (et le parti avec) pour de stupides
questions de nominations ou de places sur des listes...
Voyons enfin un dernier point dans ce panorama non exhaustif (je traiterai les autres dans les commentaires si nécessaire) : les composantes du parti. Le Mouvement Démocrate a une structure sociologique et idéologique complexe héritée des origines multiples de ses fondateurs (et des membres qui l'ont rejoint ensuite, car il y en a toujours et pas seulement des taupes!) :
- des membres de l'UDF (très divers) et des membres de CAP21, les deux partis fondateurs,
- des membres venus d'autres partis, notamment des Verts et du PS,
- des membres dont c'est le premier engagement en politique (l'une des grandes victoires de ce parti, même si ce n'est hélas bientôt plus qu'un souvenir...).
Ajoutez-y d'éventuels alliés conjoncturels pour certaines élections, comme ce sera peut-être le cas de certaines formations écologistes et/ou régionalistes pour les prochaines élections régionales début 2010.
Comment voulez-vous obtenir
une juste représentation des compétences et des sensibilités (sans parler de la
parité et des diversités) aux places éligibles des listes par un processus de
primaires internes ?! Un tel processus conduirait sans nul doute à une
distribution reflétant surtout le poids démographique des différentes
catégories, avec "prime aux majoritaires", et excluant de fait les
"petits" (certains écologistes, les nouveaux arrivants en politique
sans réseaux internes, etc) qui recèlent pourtant d'excellentes compétences
(elles ne sont pas -encore- toutes parties...). Entendons-nous bien : je ne
suis pas favorable à une représentation proportionnelle des différentes
sensibilités à la manière d'un système à quotas. Mais il est clair que dans ce vivier
formidable que constituent ces catégories il y a des talents qu'il faudra
absolument mettre en avant (donc à des places éligibles sur les listes)
indépendamment des élus sortants et des catégories démographiquement
majoritaires dans le parti ; et je doute fortement que cela puisse se faire
simplement sur la base d'une élection interne sans intervention des
responsables nationaux.
Ces quelques éléments étant posés, je tiens à rappeler que je ne méprise ni ne néglige les processus internes participatifs. J'estime même qu'ils sont notre objectif à moyen terme, car ils sont indispensables à l'avènement d'une véritable démocratie en ce XXIème siècle. Dans l'intervalle, je prône un processus tel que défini par Sébastien Dugauguez il y a quelque temps.