Une société moderne, lucide et juste peut et doit tolérer certaines formes d'homicide (I) Avortement et recherches sur l'embryon
Un diptyque chaussé de gros sabots sur des sujets sensibles qu'il faut pourtant aborder sans tabou (et indépendamment de toute considération religieuse en ce qui me concerne, ce sera l'objet d'un autre billet pour lequel je vous solliciterai).
Je fais fi de toutes ces controverses malsaines sur le statut de l'embryon, où certains tentent de s'accorder sur une date à partir de laquelle il serait prétendument (et soudainement) une personne humaine, et avant laquelle on pourrait en disposer tel un objet, une chose.
Les choses sont pourtant d'une simplicité limpide : il y a continuité de la vie dès le stade du zygote issu de la fécondation jusqu'à l'organisme adulte, en passant par l'embryon et le foetus (entre autres).
Nous avons donc affaire à un être humain dès le stade du zygote (qu'il soit en devenir, non encore totalement réalisé -d'ailleurs un foetus, un nourrisson ou même un enfant le sont-ils?-, ne change pas le fond de la question) et j'affirme que toute assertion contraire est fallacieuse et malsaine.
Je laisse à ceux qui pinaillent sur les notions d'être sensible, de construction / fonctionnement cérébral, et autres joyeusetés, l'entière responsabilité des implications de leur démarche au sujet des personnes dans le coma, des handicapés mentaux (d'origine génétique ou traumatique), ou même des animaux domestiques et sauvages.
Les choses sont donc claires : l'organisme issu d'une fécondation (in vivo ou in vitro) est un être humain.
Alors, l'affaire est pliée, fin de l'histoire ? Il faudrait renoncer à l'avortement et aux recherches sur l'embryon ?
Au risque de surprendre et de choquer, je réponds que non. La société peut parfaitement, sans remettre en cause son principe fondamental de respect de la vie humaine, accepter des pratiques abortives ou médico-scientifiques sans pour autant faire preuve d'incohérence. Tout est question de prise de responsabilité assumée et de transparence.
Les arguments en faveur de l'avortement sont nombreux et connus, je ne vais pas les reprendre en détail. On peut citer par exemple la mise en danger de la vie de la mère, la présence de pathologies graves chez l'enfant en devenir, la grossesse consécutive à un viol, etc. C'est un choix, possible et raisonnable, qui peut et doit être assumé.
Si la possibilité d'avorter doit être garantie, elle doit toutefois être encadrée strictement, en particulier il faut :
- sensibiliser les femmes (et même les couples) au fait qu'il ne s'agit pas d'un acte anodin, physiologiquement et psychologiquement (en plus du fait qu'il s'agit bien d'un homicide légal), et que ce doit être une solution de dernier recours
- et restreindre les motifs aux cas extrêmes, il ne s'agit pas de dériver vers l'eugénisme ou un substitut à la contraception (des dispositions devraient même être prévues en cas de "récidives"...).
En ce qui concerne les recherches sur l'embryon, la situation est plus complexe dans la mesure où il n'y a pas d'impératif mettant directement une vie en cause (hormis celle de l'embryon concerné...).
On peut sommairement considérer qu'il y va alors de l'intérêt général de la société, celui des malades qui pourront être guéris plus ou moins indirectement grâce aux résultats de ces recherches.
Cela ne constitue toutefois pas une justification suffisante, la médecine et la science ne peuvent pas tout s'autoriser sous ce prétexte (on a vu ce qui s'est passé pendant la seconde guerre mondiale...).
Il faut y ajouter un élément "débloqueur" : le recours exclusif à des embryons surnuméraires issus de la procréation médicalement assistée (en admettant que celle-ci soit acceptée dans ses modalités actuelles, ce qui reste sujet à débat, par exemple certains considèrent que l'adoption est préférable) avec l'accord des parents qui n'ont pas de projet de vie pour ces embryons (de fait voués à la destruction, ce qui est une autre forme d'homicide légal...).